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Résumés d’articles scientifiques



ALTRUISME : Les femmes et les hommes ne sont pas altruistes de la même manière
AMOUR : L’amour romantique durable, ça existe !
ENSEIGNEMENT : La psychologie positive à l’école : Présent et avenir
RESILIENCE : Face aux catastrophes mortelles, la solidarité plutôt que l’égoïsme

Les femmes et les hommes ne sont pas altruistes de la même manière

Femmes et hommes ont globalement le même niveau d’altruisme, mais celui-ci s’exprime différemment selon le sexe ; tel est le constat que dresse Alice Eagly, psychologue américaine qui travaille depuis de nombreuses années sur les différences entre femmes et hommes et qui a été récemment distinguée pour l’ensemble de son œuvre par l’Association américaine de psychologie.

Alice Eagly part d’une distinction, élaborée par David Bakan au milieu des années 1960 et souvent reprise depuis, entre l’action énergique (agency) et la relation (communion). De nombreuses études ont montré que les femmes ont plutôt tendance à adopter des comportements relevant de la relation et les hommes des comportements relevant de l’action énergique.
Ceci se retrouve dans les actes qualifiés de prosociaux par les psychologues, c’est-à-dire des actes bénéfiques aux autres (aide, partage, soutien émotionnel, sauvetage, etc.) : les femmes ont tendance à fournir des soins et un soutien émotionnel, tandis que les hommes ont tendance à aider en situation d’urgence et de danger. Examinons cela plus en détail.

Diverses recherches ont montré que les femmes manifestent plus de sensibilité et d’empathie à l’égard d’autrui ; d’ailleurs hommes et femmes préfèrent généralement recevoir du soutien d’une femme plutôt que d’un homme. Par ailleurs, malgré la récente évolution de la division traditionnelle du travail domestique, les femmes passent toujours environ deux fois plus de temps que les hommes à s’occuper des autres dans la famille, et elles constituent les ¾ des personnes s’occupant des parents âgés. Tandis que les hommes, dans les foyers avec enfant, passent en moyenne deux fois plus de temps au travail que les femmes.
Au travail, quel que soit le statut professionnel, les femmes ont des comportements plus amicaux, altruistes et expressifs que les hommes. Par exemple, les femmes médecins sourient plus et tiennent des propos plus positifs et plus liés aux émotions que leurs collègues masculins. Les femmes sont surreprésentées dans les professions liées à la relation humaine, telles que l’enseignement en école maternelle (98 %), le travail infirmier (92%) et le travail social (79 %). Enfin, les femmes sont plus souvent (56 %) que les hommes récompensées officiellement pour des actes d’engagement exceptionnel dans les domaines humanitaires ou de soins.
Les femmes sont même plus nombreuses (58 %) que les hommes à faire un don d’organe ; plus encore, les dons d’organe d’épouse à époux sont bien plus fréquents que les dons d’époux à épouse…

Quant aux hommes, ils sont bien plus souvent cités dans la presse et officiellement récompensés pour des actes de courage - en particulier en risquant leur vie pour sauver d’autres personnes - que les femmes (environ 90 % des médaillés sont des hommes). Or, selon Alice Eagly, ceci n’est très probablement pas le résultat d’un biais au détriment des femmes.
Par ailleurs, les hommes sont largement surreprésentés chez les pompiers (95 %), les soldats (86 %) et les policiers (85 %).
Enfin, au cours d’expériences dans lesquelles une personne simule une situation problématique (tomber dans la rue, être victime d’une crise, etc.), les hommes aident plus souvent que les femmes.

D’où viennent ces différences ? Plutôt que d’opposer deux conceptions, comme c’est souvent le cas, Alice Eagly choisit de les associer. Elle souligne en effet l’« interaction biosociale » entre les caractéristiques physiques et les structures sociales.
L’origine ultime réside, selon elle, dans les différences physiques entre sexes, en particulier les activités de reproduction de la femme, ainsi que la taille et la force plus importantes de l’homme. Dans la plupart des sociétés, les activités de la femme liées à la reproduction (gestation, allaitement, soins du bébé et du jeune enfant) nécessitent beaucoup de temps et d’énergie. Parallèlement, la force et la taille plus importantes de l’homme le prédisposent pour des activités exigeant de la force.
Cette division du travail a entraîné des attentes sociales spécifiques : de relations pour la femme, d’actions énergiques pour l’homme. Les hommes et les femmes correspondant bien au stéréotype de genre ont traditionnellement été mieux acceptés dans leur société.
Alice Eagly s’interroge, in fine, sur l’avenir de cette division des rôles. Elle constate que les femmes sont nettement plus présentes dans des postes de cadres, statut traditionnellement dominé par les hommes, et ont, par conséquent, tendance à se considérer comme plus aptes qu’autrefois à s’engager dans des actions énergiques. En revanche, Alice Eagly est plus dubitative en ce qui concerne le changement chez les hommes : les femmes sont toujours surreprésentées dans les métiers relationnels et de soins ; dans la famille, les femmes passent toujours nettement plus de temps pour les activités ménagères que les hommes, même lorsque les deux partenaires ont un travail à plein temps.

Source : Eagly A. H. (2009). The his and hers of prosocial behavior : An examination of the social psychology of gender, American Psychologist, 64 (8), 644-658.

© Jacques Lecomte - http://www.psychologie-positive.net

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L’amour romantique durable, ça existe !

Or, ces auteurs constatent que plusieurs questionnaires, souvent utilisés pour mener des enquêtes sur l’amour passion, comportent des items sur l’aspect obsessionnel de cette relation (par exemple : « J’ai parfois du mal à me concentrer au travail parce que des pensées relatives à mon-ma partenaire occupent mon esprit »). Mais l’amour passion peut-il exister sans cette facette obsessionnelle, et si oui, quel en est l’impact sur la satisfaction dans le couple ?

Ils vont tenter de répondre à cette question de deux manières. Tout d’abord, ils procèdent à une enquête auprès de 312 personnes vivant en couple hétérosexuel, d’une durée moyenne d’environ neuf ans.
Leur conclusion est que l’amour romantique peut durer longtemps. Des personnes maintiennent des relations positives intenses, durables et sexuellement satisfaisantes avec leur partenaire. En fait, comme le supposaient les deux chercheurs, dans une relation à long terme, l’amour romantique et l’obsession sont bien distincts : l’amour romantique sans obsession est corrélé à la satisfaction dans le couple, alors que la présence de la facette obsessionnelle est corrélée à l’insatisfaction dans le couple.
D’autre part, Bianca Avecedo et Arthur Aron ont procédé à une méta-analyse (synthèse statistique d’études déjà existantes) de 25 recherches, qui ont, elles aussi, pris en compte séparément la facette obsessionnelle. Les résultats sont identiques ; de plus, cette synthèse montre que l’obsession est légèrement corrélée positivement chez les personnes en couple depuis peu de temps.

Source : Acevedo B. P. and Aron A. (2009). Does a Long-Term Relationship Kill Romantic Love ?, Review of General Psychology, 2009, 13 (1), 59–65.

© Jacques Lecomte - http://www.psychologie-positive.net

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La psychologie positive à l’école : Présent et avenir

L’enseignement vise la réussite scolaire des élèves, certes ; mais Martin Seligman et ses collègues nous proposent d’imaginer que les écoles puissent à la fois enseigner les compétences d’apprentissage scolaire et les compétences facilitant le bien-être, le tout formant ce qu’ils appellent une éducation positive.

Ces chercheurs ont testé deux programmes, respectivement intitulés Programme de résilience de l’Université de Pennsylvanie (PRP) et Programme de Psychologie positive de Strath Haven.

L’objectif majeur du programme PRP est d’accroître la capacité des élèves à faire face aux stress et problèmes quotidiens. Il favorise l’optimisme en leur enseignant à penser d’une manière plus souple et réaliste face aux difficultés. Il enseigne également l’assertivité, la pensée créative, la prise de décision, la relaxation et la résolution de problèmes.
Plusieurs dizaines d’études ont évalué ce programme auprès de jeunes âgés de huit à quinze ans, en comparant les résultats avec ceux de groupes contrôle ne bénéficiant pas de ce programme. Résultat : le programme PRP réduit et prévient la dépression, l’anxiété et le désespoir, et augmente l’optimisme. Par ailleurs, il peut réduire les problèmes de comportement (les recherches sur ce thème sont moins nombreuses).

Quant au programme de Psychologie positive de Strath Haven, c’est le premier programme explicitement basé sur les principes de la psychologie positive qui fasse l’objet d’une étude empirique. Son principal objectif est d’aider les élèves à identifier et utiliser les points forts de leur caractère. Par exemple, dans un exercice, les élèves doivent écrire trois bonnes choses qui se sont passées chaque jour durant une semaine. Il peut s’agir d’événements relativement limités (par exemple : « Aujourd’hui, j’ai bien répondu à une question difficile en cours de français ») ou plus importants (par exemple : « Le garçon qui m’attire depuis plusieurs mois m’a proposée de sortir avec lui »). L’élève répond également par écrit à ces questions : « Pourquoi cette bonne chose est-elle arrivée ? », « Qu’est-ce cela signifie pour moi » et « Comment puis-je augmenter la probabilité que cet événement positif se reproduise plus souvent dans l’avenir ? ».
Par ailleurs, les élèves passent un questionnaire permettant d’évaluer les points forts de leur caractère.
Les études évaluant ce programme ont montré qu’il augmente la satisfaction à l’école et l’engagement des élèves dans l’apprentissage ainsi que leur réussite scolaire. Il favorise également le développement de compétences sociales telles que l’empathie, la coopération et le contrôle de soi.
Ceci a été initialement mis en évidence dans des classes, mais l’occasion a été fournie de tester la valeur de ce programme dans tout un établissement scolaire, suite à la demande faite en 2008 par la Geelong Grammar School, située en Australie, à une heure de Melbourne, où sont inscrits environ 1500 élèves. Les enseignants de cet établissement ont été formés aux compétences de la psychologie positive (points forts du caractère, gratitude, communication positive, optimisme, résilience, etc.). Ces principes ont même été intégrés dans certains éléments du cursus. Par exemple, les professeurs d’anglais ont utilisé le concept de résilience pour mettre en évidence les modes de pensée plus ou moins pertinents lors de revers vécus par les personnages de Mort d’un commis voyageur d’Arthur Miller ou de Métamorphose de Franz Kafka.
Les enseignants de géographie ont notamment demandé aux élèves de réfléchir à la façon de mesurer le bonheur des habitants d’un pays, et aux différences de critères de bien-être pouvant être utilisés dans des pays tels que l’Australie et l’Iran ou encore l’Indonésie. Les enseignants d’école primaire ont commencé la journée en demandant ce qui s’était bien passé dans la vie des enfants, tandis que les professeurs de dessin et de musique ont incité les élèves à savourer la beauté de l’art. Etc.
Les résultats définitifs de l’évaluation ne sont pas encore disponibles, mais les chercheurs soulignent que leur impression ainsi que celle des membres du personnel est que le programme s’est révélé très efficace.

Source : Seligman M. E. P., Ernst R. M., Gillham J. Reivich K & Linkins M. (2009). Positive education : positive psychology and classroom interventions, Oxford Review of Education, 35 (3), 293–311.

© Jacques Lecomte - http://www.psychologie-positive.net

Voir également la page « Enseignement » du site psychologie-positive.net : http://www.psychologie-positive.net...

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Face aux catastrophes mortelles, la solidarité plutôt que l’égoïsme

L’opinion commune considère que les victimes de catastrophe collective paniquent et tentent à tout prix de sauver leur peau, en restant indifférentes aux autres victimes. La réalité est bien différente, puisque les différentes recherches menées, en particulier sur la base de témoignages et d’enregistrements de caméras de surveillance, ont montré que, dans de tels contextes, le comportement collectif est généralement caractérisé par l’aide réciproque et le calme plutôt que par la compétition et la panique.

Alors que l’approche selon la « panique de masse » postule la dissolution des liens sociaux, d’autres conceptions soulignent au contraire leur maintien. Cependant, une équipe de chercheurs britanniques estime que cela ne permet pas d’expliquer pourquoi les victimes aident des personnes qui leur sont totalement inconnues. Ils proposent que la raison est qu’en cas de catastrophe collective, une identité collective se crée spontanément entre les victimes.
Ils ont mené une enquête à partir d’entretiens auprès de 21 survivant-e-s de 11 catastrophes, ayant toutes impliqué des centaines de personnes.

Certaines personnes ont signalé qu’elles avaient été très préoccupées par le sort de leurs proches ou amis qui se trouvaient avec eux au moment du drame, mais la plupart des actes d’aide ont concerné des gens qui ne se connaissaient pas.
L’une de ces personnes a déclaré : « Je pense que chacun serait d’accord avec l’idée que nous sommes allés au-delà du fait de définir la personne en tant que supporter de football. A ce moment, il y avait seulement des êtres humains en lutte. (…) Je pense que personne n’a vu des fans de Liverpool ou des fans de Notts Forest. Les gens ont arrêté d’être des supporters d’une équipe de foot et étaient seulement des personnes. »
Une autre a dit : « Je dirais que nous nous sommes soutenus mutuellement. Nous étions tous des étrangers les uns envers les autres mais (…) il y avait cette sorte de camaraderie dont on entend parler en temps de guerre, il y avait certainement le fait d’agir ensemble plutôt que d’agir séparément. » Dans presque tous les cas, le sentiment d’un destin partagé était décrit en termes d’une menace partagée de mort.

Source : Drury, J., Cocking, C. & Reicher, S. (2009). Everyone for themselves ? A comparative study of crowd solidarity among emergency survivors, British journal of social psychology, 48 (487-506).

© Jacques Lecomte - http://www.psychologie-positive.net